"On disoit à Socrates que quelqu'un ne s'estoit aucunement amendé en son voyage: Je croy bien, dit-il, il s'estoit emporté avecques soy."
Montaigne, Essais, I, 39: "De la solitude"

"Oh there is blessing in this gentle breeze"
William Wordsworth, The Prelude, I, 1

lundi 4 juin 2012

Paris-Oléron (en esprit)


Il y a à Oléron, dans le garage, une planche à voile ancienne et fidèle. Deux voiles possibles, une grande pour les grands et une petite pour les autres - mais elle n'avance pas. Le mât se décroche tout seul de sa base... Il m'est tombé sur la tête une ou deux fois.

Il y a les couchers de soleil sur le petit port, Ti-Kieun, et le sable grossier et les goémons noirs qui souvent s'échouent sur la plage en lourdes masses. On peut marcher dedans et c'est chaud, gluant, vivant. A marée haute il y en a partout quand on nage, on se croirait dans une jungle liquide.

Les jours de grande marée on nageait dans les vagues. Le courant nous emportait vers les digues de rochers, il fallait revenir vers des endroits plus sûrs. Loin des brisants, on pouvait prendre quelques libertés avec les déferlantes. Suivre la crête le plus loin possible, chaque fois un peu plus loin, jusqu'au moment où l'on est happé en dessous... Brusquement plaqué au fond par la force immense de l'eau qui s'abat. Lors du ressac on se relève enfin, le souffle coupé.


Le 14 juillet on tirait un feu d'artifice entre nous. On allait choisir des fusées à Saint-Pierre, et des pétards avec une tête de tigre sur le paquet. Les "Feux de Bengale" : un nom-merveille, que Sylvain prononçait d'un air expert. C'était lui que l'on chargeait de tirer les fusées, mais on m'en laissait quelques-unes.

Bien souvent, au milieu d'une claire nuit de juillet, je me suis sauvée par la fenêtre pour aller retrouver le sable froid de la plage. J'avais très peur qu'on me surprenne et cela suffisait à m'occuper. En sursis, j'écoutais longuement le bruit sans fin des vagues, et le phare de Chassiron brillait au loin de sa lumière intermittente. Je rentrais me coucher le pyjama plein de sable.

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