"On disoit à Socrates que quelqu'un ne s'estoit aucunement amendé en son voyage: Je croy bien, dit-il, il s'estoit emporté avecques soy."
Montaigne, Essais, I, 39: "De la solitude"

"Oh there is blessing in this gentle breeze"
William Wordsworth, The Prelude, I, 1

mardi 14 août 2012

Paris - Lons-le-Saunier - Paris : bilan

850 km au compteur, aller-retour. Le jura n'est donc pas loin de Paris.
Certes j'ai élargi un peu les bornes... En fait c'est Villemoisson-sur-Orge - Le Louverot - Moret-sur-Loing, mais il me fallait un titre plus économe.


1. On peut passer une vie à pédaler en Bourgogne.
2. Il s'ensuit que quatre jours pour la traverser, c'est plus logique que trois.
3. Pédaler tout seul c'est génial. Pédaler à plusieurs, aussi.
3. Les chaussures Shimano sont vraiment cool. Elles sont très aérées.
4. Se baigner dans la rivière tout habillé et pédaler après...
5. Point camping : quand il n'y a pas de rosée c'est vraiment mieux - y penser.
6. Regret : dommage que le vin coupe les jambes. C'est le dilemme du cycliste en pays bourguignon.

3. Chablis - Moret-sur-Loing (Seine-et-Marne, 77)

J'ai triché à la fin, j'ai pris le train sur une trentaine de kilomètres. Cette dernière journée a été belle mais un peu dure, principalement parce que c'était le retour. Je me suis réveillée vers huit heures à La Chapelle Vaupelteigne, le village qui touche le Serein.

Sur cet arbre les champignons énormes font comme des marches !
Après une jolie route qui rejoignait Migennes j'ai pris une route un peu grosse pour aller plus vite, jusqu'à Sens, ce qui a un peu endommagé mon moral. Je ne sais plus où, j'ai aussi fait une chute absurde, à l'arrêt comme d'habitude. En m'arrêtant j'avais passé un peu tard une vitesse moins dure, en repartant mon pied gauche s'enclenche mais au lieu d'entraîner le vélo la chaîne mal engagée ripe, trop tard pour décrocher le pied, BOUM encore. Je ne me suis pas fait mal du tout, mon Kindle a encore survécu, ça devient une habitude. Le soleil a tapé fort après midi, et j'étais triste de commencer à quitter la Bourgogne. En plus, j'avais le vent contre moi, un petit vent d'ouest tenace. À Sens, c'était jour de marché.

Je mange des carottes râpées devant le marché et la cathédrale en travaux.
Après manger je me dis qu'à un endroit je pourrais prendre le train pour finir la journée plus tôt, parce que je me sens un peu fatiguée. Je n'ai pas envie de pédaler en banlieue, mes yeux se sont faits aux champs et au ciel libre. Je prends la D26 en direction de Voulx, c'est bien, je traverse de petits villages, mais j'ai trop chaud. Quelque part je croise une stèle, à la mémoire de Français "assassinés par l'Allemand", et je m'interroge sur la violence du singulier. A Voulx je prends la direction de Moret-sur-Loing, où je pense pouvoir trouver un train - ce nom me dit quelque chose. En arrivant, je n'ai plus envie de repartir, c'est très beau, une très ancienne porte en pierre m'accueille, un pont sur la rivière majestueuse... Du coup, si le nom me disait quelque chose, c'était peut-être grâce à Sisley:

Sisley, Moret-sur-Loing, 1891
[A moins qu'une autorité compétente ne m'ait conseillé de m'y rendre.] Des pavés. Je vais à pied. Beaucoup de monde dans les rues, je n'ai plus envie de remonter sur mon vélo, et puis j'ai mal aux jambes. Un peu d'exercice supplémentaire pour le porter dans les escaliers du RER. C'est quand même lourd. C'est drôle, quand on porte quelque chose de vraiment lourd c'est difficile de trouver de l'aide. Quelques changements de train et me voilà à la maison à temps pour le dîner. C'est vrai que ça va vite, le train, quand même.

dimanche 12 août 2012

2. Thorey-sur-Ouche - Chablis (Yonne, 89)

J'écris du bord du Serein, où j'ai pris un bain tout à fait opportun, bien que froid. Le soir tombe. Ce matin j'ai quitté Thorey à regret, car c'est un si bel endroit, et j'ai continué seule vers Paris. De gros nuages gris couvraient vraiment tout. Par ce temps sombre qui m'est agréable j'ai suivi le canal de Bourgogne jusqu'à Pouilly, puis Semur-en-Auxois. J'ai admiré l'eau calme, comme je le fais encore en cet instant.

Cette photo n'est pas de moi, mais je suis passée sur ce pont, je crois.
 Vers treize heures, à Semur, il s'est mis à bruiner. J'étais en train de manger des lasagnes en terrasse, en compagnie de deux cyclistes qui se rendaient à Saint-Jacques de Compostelle avec des vélos surchargés, et je me suis planquée à l'intérieur. Puis je repars direction Époisses. Là, un château dont je fais le tour en quelque sorte. C'est très calme.

L'époisses d'Époisses !
Il ne pleut plus mais les nuages menacent. Je me dirige vers Noyers-sur-Serein, qui m'a été conseillé par diverses instances dont les cyclistes pèlerins. Le temps se lève. Je me sens très libre quand je suis en haut d'un plateau et que je vois la route défiler en contrebas.

Cette route fait battre mon cœur, encore maintenant.
Noyers s'illumine quand j'y parviens, c'est splendide. Un autre monde... Mais beaucoup de touristes en ce dimanche. Ils m'observent quand je fais un peu de vaisselle dans la rivière, après le goûter (des céréales au lait en poudre, miam).

Derrière la porte, à droite, il y a plein de fleurs sauvages.
 La suite est très belle jusqu'à Chablis. Je pourrais continuer un peu mais cette rivière me fait de l’œil dans le soleil déclinant, et je succombe. Maintenant je vais aller planter ma tente un peu plus loin, car les galets c'est un peu dur. Il fait déjà sombre. Demain je peux peut-être rejoindre la maison si je pars tôt et que je ne m'arrête pas...

samedi 11 août 2012

1. Le Louverot - Thorey-sur-Ouche (Côte d'Or, 21)

Pour la première fois, je pédale en compagnie, puisqu'Éliane m'accompagne du Louverot à Thorey, où une maison amie fera une étape idéale. Je n'ai pas pris une seule photo, très occupée à n'être pas seule. C'est passé très vite, même la grande plaine de la Bresse. Vent plutôt dans le dos. On a vu des animaux bizarres, des formes un peu géométriques, des lignes électriques qui faisaient des courbes harmonieuses comme des drapés. A Verdun sur le Doubs, il y a des silos immenses. On déjeune à Beaune, de la viande crue miam miam, et en repartant il fait encore plus chaud et c'est là que ça monte... Doucement, mais longtemps. Eliane, qui connaît la route, me dit que quand on verra un restaurant ce sera très bon signe, et en effet la rude montée s'arrête, on doit refaire un plein d'eau pour se remettre, et nous y sommes presque. A cet endroit qui s'appelle La Bâche, les jours de très beau temps, on aperçoit parfois le sommet du mont blanc, mais l'air de ce jour ensoleillé n'est pas limpide. Un petit raidillon pour parvenir au sommet de Thorey, et là c'est encore un peu de paradis sur terre.

Thorey, carte postale de 1905
Comme si tant de bonheur ne suffisait pas, on va se baigner dans un lac tout bleu, en fait une retenue d'eau sur le canal de Bourgogne. L'eau est bien fraîche et c'est merveilleux de nager. En sortant le soleil réchauffe.

Vu du ciel apparemment ça donne ça, le réservoir de Panthier, mais quand on y nage c'est très beau aussi.

4. Autun - Le Louverot (Jura, 39)

Des nouvelles tardives de cette dernière journée vers le jura. J'avais écrit un message il y a quelques jours, mais il a disparu dans les limbes d'une connexion 3G fluctuante. J'y expliquais que l'atmosphère de beauté paisible du Louverot m'avait fait négliger mon récit. Hélas, l'heure est à présent passée des enthousiasmes bucoliques.
Le dimanche matin, je me suis donc réveillée dans le foin, assez tard, ayant bien dormi. Le foin fait vraiment des matelas parfaits, et modulables.
J'ai entendu rentrer les gens de la maison d'à côté, qui étaient sortis faire la fête vers une heure du matin.
Je prends la direction de Chalon-sur-Saône. J'y arrive rapidement, et après c'est tout droit jusqu'au Louverot. Vraiment tout droit, Eliane m'avait prévenue... À travers la Bresse, sous un soleil un peu lourd. Mais je regarde les nuages moutonneux pour me distraire. A Arlay je me jette dans la Seille pour me rafraîchir. Pour finir je m'engage naïvement sur la grosse route de Lons depuis St Germain-lès-Arlay, le GPS indique qu'elle croise la route pour Le Louverot, mais la route en question passe en dessous... Par une habile manœuvre de dégringolement je la rejoins quand même.
Joie d'arriver !

dimanche 5 août 2012

3. Avallon - Autun (Saône-et-Loire, 71)

Démarrage humide sous un ciel voilé. Le vent est incertain. Puis le soleil se lève. Je repars dans les collines, et décide d'aller vers Autun plutôt que vers Beaune. Ça monte très souvent, mais jamais très raide. En m'arrêtant sur le trottoir de gauche pour trouver de l'ombre, mon cerveau déconne, je détache le pied droit au lieu du gauche, mon pied gauche reste fixé à la pédale, BOUM. Merde. Maintenant j'ai les dents du grand plateau imprimées sur mon mollet. Plus de honte que de mal. Petites routes, le Morvan, c'est superbe. Je croise des chèvres sur la route...

Les chèvres aiment le pain dur.
Je prend un bout de N6, c'est pas terrible. La route qui descend vers Autun est un peu plus grosse que ce que je pensais, mais ça va. Beaux paysages.

Le Morvan, nom terrible et collines impitoyables
Il fait chaud, je me baigne dans un torrent, le Tarnin, je lave mes habits et je les remets, ça fait du frais. Puis Autun...

Je ne rentre pas dans la cathédrale, mais je l'admire beaucoup de l'extérieur.
 Je mange et après j'ai un coup de barre, c'est le soir, il se met à pleuvoir. Je sors de la ville pour trouver un coin où dormir. Alors survient un épisode un peu désagréable, mais je n'aurais pas dû passer cette barrière. J'avais vu des étables, il pleuvait fort, personne en vue pour demander, je cours me mettre à l'abri en attendant que la pluie diminue. Je suis sous l'étable, le vélo à la main, et un grondement terrible et un bruit de course et un molosse surgit en aboyant très fort. Il se plante devant moi et me regarde dans les yeux. Entre l'étable et la sortie, donc. Je me demande s'il va juste me mordre ou me dévorer complètement, il a l'air d'avoir faim. Je ne bouge pas et je prends un air détaché. Il ne bouge pas non plus, sauf pour aboyer et gronder. Ça dure bien dix minutes et il se lasse et part faire un tour, je bouge et il revient, encore quelques minutes et il est attiré par quelque chose d'autre un peu loin, et je gagne la sortie à pas de loups. Saleté.
Je trouve une grange à moitié abandonnée dans le village le plus proche et je m'installe dans le grenier à foin. C'est très confortable. (J'avais pris une photo de mon installation mais j'ai dû la supprimer accidentellement).

vendredi 3 août 2012

2. La Haie Pèlerine - Avallon (Yonne, 89)

Ce matin au réveil j'ai mangé des prunes sous l'arbre.


Puis direction Gron... Ici on construit un pont. Route barrée mais en vélo on passe partout.


Pas évident de trouver des petites routes pas trop en zigzag... Mais c'est très joli. J'arrive à Auxerre vers 14h sous un soleil qui tape.

On ne voit pas le soleil qui tape mais il tape.
 Rues pavées. Pause sur la place Saint Nicolas.

J'aime bien Saint Nicolas.
 Cathédrale ! Rues en pente. Je m'aperçois que j'ai perdu un bout de ma béquille en cours de route. Après Auxerre je suis l'Yonne, chemins de halage... J'aime rouler au bord de l'eau, c'est reposant.

Juste après Auxerre
 Puis il faut se séparer du fleuve, et les ennuis commencent. Les ennuis, je veux dire les montagnes russes. En Bourgogne, ça monte ou ça descend, jamais de plat.
Drôles de petits arbres
 Du coup, c'est beau. Mais un peu éprouvant. Belles descentes. Par exemple vers Lucy le Bois, impressionnante. J'aime descendre vers les villes. Bientôt la lumière du soir dans mon dos qui fait des ombres splendides. Avallon est tout illuminé.
Avallon vu d'en dessous dans la lumière du soir
Je continue un peu et je trouve un pré plutôt accueillant... J'espère ne pas me faire brouter par des chevaux demain matin. Dans la tente batifolent quelques fourmis ailées ou semblables créatures passées à travers les mailles de la moustiquaire. Je n'ai pas bien calculé j'ai les pieds plus haut que la tête... Tant pis.
J'ai traversé : Gron, Etigny, Véron, Les Bordes, Migennes, Auxerre, Gravant, Vermenton, Joux la Ville, le puits d'Edme, Lucy le Bois, Avallon.
And so to bed.

jeudi 2 août 2012

1. Paris - La Haie Pélerine (Yonne, 89)

Démarrage difficile vers 10h30.
Il apparaît rapidement que j'aurais dû changer aussi le plateau du milieu. Ça ripe. Je suis contrariée. Je roule contrariée jusqu'à Fontainebleau, je confie mon vélo à une boutique de réparation et je m'en vais visiter. Je me promène dans le parc du château. Finalement c'est un bon plan, je peux visiter sans sacoches et sans craintes pour mon vélo.

Le château de Fontainebleau ennuagé
 Je récupère une machine avec un dérailleur avant flambant neuf. Apparemment essayer de régler un dérailleur comme l'ancien était une cause perdue. J'ai donc consacré les plus belles heures de la nuit dernière à une cause perdue. Mais cette pensée laisse place à la joie immense de rouler sur un vélo silencieux et enfin performant. Surtout grâce aux pédales automatiques. Je ne m'explique pas la différence immense de sensation. C'est génial de rouler avec les pieds solidaires des pédales. Génial. Il fait un temps propice à la route, entre le grey cloud et le white cloud. Puis ça se lève vraiment.

Le foin est peu à peu rassemblé
Les gens que je croise me sourient. Peu de voitures. Dans la lumière du soir tout se dessine très nettement, je roule vite, je suis émue. Vers 21h, même si j'ai encore envie de rouler, je demande à des gens si je peux planter la tente sur leur terrain. Je m'installe, Romain, trois ans, essaye d'attacher son petit vélo à mon vélo avec un sandow.

Romain aime le principe de la remoque.
On m'invite à dîner... C'est bon, meilleur que des Corn Flakes au lait en poudre. Puis je me retire dans mes appartements amovibles.
Villages traversés aujourd'hui : Morsang, Grigny, Mennecy, Soisy sur École, st Martin en Bière, Macherin, Fontainebleau, Épisy, Villeron, Rebours, Villemer, Montméry, Lorrez le bocage Préaux, Chéroy, St Valérien, Villeroy, La Haie Pélerine.

mercredi 1 août 2012

Paris - Jura (veille du départ)

Demain, direction Le Louverot, près de Lons le Saunier, pour aller retrouver Eliane et sa famille.
Je n'ai pas prévu de Warmshowers... Je vais prendre l'option camping hasardeux. En fait je n'ai qu'une idée imprécise du relief, donc les étapes sont incertaines.
Une vague idée de l'itinéraire. Si quelqu'un a des idées d'endroits à voir absolument, qu'ils m'avertissent par SMS, s'il leur plaît.
J'ai hâte de traverser la Bourgogne !
Je viens de faire l'acquisition un peu téméraire de chaussures à cales prévues pour la longue distance. On peut marcher avec sans se casser la gueule et les cales ne s'abîment pas. Bien sûr, c'est incompatible avec les autres pédales automatiques, il a fallu en acheter avec... Mais j'ai essayé, ça fait une belle différence.
J'aimerais partir très tôt demain, mais je n'ai pas assez étudié l'itinéraire et il se fait tard. On verra.