"On disoit à Socrates que quelqu'un ne s'estoit aucunement amendé en son voyage: Je croy bien, dit-il, il s'estoit emporté avecques soy."
Montaigne, Essais, I, 39: "De la solitude"

"Oh there is blessing in this gentle breeze"
William Wordsworth, The Prelude, I, 1

lundi 7 mai 2012

De la lenteur comme pierre de touche

Extrait de l'article "Vélocipède" du Grand dictionnaire universel du XIXe siècle (1876), Pierre Larousse. 

"Un bon veloceman est aussi à l'aise sur sa monture qu'un écuyer du cirque sur son cheval favori. C'est comme un Centaure d'une nouvelle espèce. On en voit qui, sans crainte de perdre l'équilibre, jonglent des deux mains avec trois ou quatre balles ; d'autres qui jouent du violon ou de l'accordéon ; d'autres qui se tiennent debout sur la selle exiguë et même se dressent les pieds en l'air et les mains appuyées sur la barre du gouvernail, tandis que le vélocipède continue de rouler par la vitesse acquise. 

Un jour, après les luttes de vitesse, on imagina les courses de lenteur, comme fiche de consolation pour ceux qui ne parvenaient jamais à décrocher le moindre prix dans les premières. Il arriva ceci : que ce furent les lauréats de la vitesse qui gagnèrent encore les prix de lenteur. On croyait avoir voulu jouer à qui perd gagne, mais l'on s'était aperçu aussitôt qu'il faut beaucoup plus d'habileté pour conserver l'équilibre avec une allure de marche solennelle que pour exécuter une course de vent soufflant en tempête. L'extrême lenteur est la pierre d'achoppement du vélocipédiste ; elle est en même temps la pierre de touche de son art."

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